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mardi 14 février 2023

La fugitive de l’autre côté du pont de fil – Yves Revert

 

Ed. du Rouergue, collection La Brune, 2023

Un auteur que je ne connaissais pas (Yves Revert), un titre de roman bien mystérieux, un texte de 4 couv alléchant, une énigmatique photo en noir et blanc très réussie (Fran Núñez). Comment résister ? Merci Babelio, Masse Critique, à l’auteur et aux Editions du Rouergue (Collection « La Brune»).

« La fugitive de l’autre côté du pont de fil »: une vie en je narratif. Celle d’une femme dont on ne saura jamais le nom (un mystère parmi d’autres). Un roman à rebrousse-temps, d’aval en amont (de 63 ans en 2006, jusqu’à la trentaine en 1971). Un théâtre personnel rétrospectif, mené sur le fil de 35 ans écoulés et dont le lecteur prend connaissance par petites touches lentement amenées à l’avant-scène. Chaque détail, même le moindre, a son importance ; la reconstitution du puzzle dans son entièreté est au prix d’une lecture attentive. L’héroïne se parle à elle-même tout autant qu’à nous, semble au cœur d’un bilan personnel introspectif qui, en courts chapitres comme autant de flashbacks, nous fera vivre ses petits et grands bonheurs passés et ira gratter de lointains petits secrets soigneusement cachés, enfouis sous la croute des non-dits et des instants refoulés, racler la mémoire envasée qui remonte difficilement à la surface. Le lecteur, peu à peu, voit se dérouler à l’envers trois décennies et demi écoulées, entre incontinence mémorielle et rétentions ponctuelles. 220 pages et 36 courts chapitres. Une existence dévoilée dans l’ordre antéchronologique, une femme et ses failles, ses faiblesses, ses richesses et, surtout, ce qui dans son passé interfère douloureusement et conditionne.

C’est une femme née des 30 Glorieuses, au rythme bienheureux de ces années-là, plus en prise avec l’instant présent qu’avec un futur qui ne dévoile encore que peu ses ombres aux aguets. Une vie qui va avec, comme dans l’ordre tranquille des choses de ce temps-là : une famille heureuse, presque autarcique, repliée sur elle-même de dimanche en dimanche, d’anniversaire en anniversaire, d’une fête de fin d’année à l’autre. Une vie de femme racontée à soi-même sur le fil, tour à tour coloré ou grisâtre, d’une pelote de laine qui, dévidée peu à peu, se déroule du bout périphérique d’aval vers le bout central d’amont, de l’écorce vers le magma central où déjà mitonne un avenir en attente . On y trouve des failles masquées/camouflées/maquillées/cachées aux autres et à soi-même, des faits oubliés ou refoulés, ceux glissés sous le tapis …

 

« La fugitive de l’autre côté du pont de fil » est un lent voyage à reculons du présent vers un maintenant lointain passé, une plongée introspective qui, de détails peu à peu révélés comme autant de pièces emboitées reconstitue le puzzle d’une existence. Une femme revisite ce qui fut et est advenu. Un passé comme un autre, celui d’une femme de la classe moyenne. De la soixantaine bien entamée à la trentaine florissante. 35 ans d’une vie comme une autre, presque sans débords, sans faits exceptionnels notable si ce n’est que là-bas, presque oublié, un fait mijote qui a conditionné les années qui filent

Un roman à rebrousse-temps : l’idée est ingénieuse, elle est bien menée sur le fil tendu entre présent et passé. La prose est magnifique, c’est l’atout principal du roman ; on y trouve de belles fulgurances qui restent accrocher après lecture.


 


2 commentaires:

  1. C'est bien mystérieux tout ça.. c'est un peu comme une double vie non? Une vie banale en apparence, mais une autre face dans les profondeurs de l’Être?

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    1. Non. Une vie lambda, semble t'il. Avec des écueils qui surgissent de zones de mémoire oubliées.

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